Autrefois classée dans l’ordre des Scrophulariales, la famille des Acanthaceae fut regroupée dans l’ordre des Lamiales (sauge, menthe…) par un ancêtre commun ; cette famille est d’ailleurs monophylétique (issu d’un seul ancêtre).
Après des études phylogénétiques moléculaires, certains auteurs ont reclassé les familles Nelsoniaceae et Avicenniaceae dans cette famille composée alors d’environ 200 genres comptant de 2 500 à 4 000 espèces, voire plus.
4 sous-familles : Acanthoideae – Avicennioideae – Nelsonioideae – Thunbergioideae. L’ancienne famille puis sous-famille Mendoncioideae est désormais une des 2 tribus des Thunbergioideae.
Cette classification des sous-familles a constamment évolué et pourrait être encore modifiée du fait de la diversité exceptionnelle de ces angiospermes (plantes à fleurs), que ce soit des diversités géographiques, écologiques ou morphologiques ; certaines études ont mis aussi en évidence la grande diversité des formes polliniques de cette famille. Certains chercheurs regrettent le manque d’intérêt de leurs collègues pour élucider les mystères de l’évolution de cette famille faisant partie des 12 familles les plus diversifiées de la botanique. Le premier à vraiment s’y intéresser au XIX° siècle, en 1895, fut Gustave Lindau qui tenta de mettre de l’ordre dans cette famille ; le dernier grand reclassement connu est celui de Robert W. Scotland et Kaj Børge Vollesen en 2 000.
On pourrait s’étonner, voire même s’agacer, du remaniement constant des classifications des plantes mais cela se justifie par une évolution constante des connaissances ; voilà ce qu’en disait Aline Aline Raynal-Roques, en 1994, dans son ouvrage ‘La botanique redécouverte’ (à la portée de tous).
« Malgré ses imperfections, la classification est la synthèse, perpétuellement remise en question, des savoirs acquis et des connaissances intuitives ; elle constitue donc le résumé d’une immense documentation intégrée à la pensée biologique et évolutionniste. »
Sous-familles
– Acanthoideae : 6 tribus dont 2 sont traitées dans cet article. Cette sous-famille est constituée des ¾ des espèces de la famille.
∙ Tribu Acantheae : une vingtaine de genres avec 550 espèces. Le genre Acanthus est le plus connu et considéré comme le genre type de la famille d’où sa présentation ci-dessous.
∙ Tribu Justicieae : une centaine de genres avec 2 000 espèces.
– Thunbergioideae, 2 tribus comprenant 5 genres avec 260 espèces. Les 2 tribus se distinguent par des fruits différents : Mendoncieae et ses drupes charnues indéhiscentes et Thunbergieae et ses fruits ligneux à déhiscence explosive. Feuilles dépourvues de cystolithes.
Les deux autres sous-familles ne sont pas traitées dans cet article.
– Avicennioideae ne comporte qu’un seul genre, Avicennia regroupant 8 à 11 espèces, constitué de petits arbres et arbustes dont 9 espèces sont des plantes halophytes (s’accommodent ou aiment de fortes concentrations de sel) ; ce sel est d’ailleurs présent dans leur sève et rejeté par certaines feuilles que l’on pourrait qualifier de ‘feuilles sacrifiées’ vu que cet excès les fait rapidement dépérir pour le bien-être de la communauté. Ce sont des plantes de mangroves près des côtes tropicales, elles peuvent développer des racines aériennes : des pneumatophores ou des échasses. Les Avicennia sont connues sous le nom de palétuvier, nom attribué à d’autres espèces de genre et de famille différents. Ce sont des plantes vivipares (embryon se développant dans le fruit encore rattaché à la plante-mère). Les lucioles aiment se regrouper sur ces arbres.
– Nelsonioideae est composée de 6 genres de plantes se développant dans des milieux arides tropicaux. Feuilles dépourvues de cystolithes.
Pour les passionnés de classification des Acanthaceae, je vous conseille l’article numérisé : https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/tax.12600
L’origine de cette famille remonterait à l’Oligocène (33,9 à 23,3 millions d’années).
Elle est principalement présente en régions tropicales, Indonésie – Malaisie – Afrique – Brésil – Amérique Centrale, et environ 35 genres en régions tempérées. Le type d’habitat est particulièrement diversifié. Plus de 400 espèces sont considérées comme endémiques.
L’espèce Acanthus mollis validée par Linné a donné son nom à la famille décrite et nommée en 1789 par le botaniste français Antoine-Laurent de Jussieu.
Acanthus est un nom latin issu du grec ancien ‘akanthos’ signifiant fleur ‘anthos’ et épineuse ‘ake’ en référence aux bractées ; le radical ac signifie pointe en langue celtique.
– Très diversifiée, cette grande famille est composée aussi bien d’arbustes (Aphelandra, Barleria…) ou d’herbacées (Acanthus…) mais quelques genres regroupent des arbres (Avicennia, Tricanthera, Bravaisia…) ou des lianes grimpantes (Thunbergia, Mendoncia…) ou des rampantes (certaines Fittonia, Dicliptera…) ou bien encore des plantes aquatiques (Hygrophila) ou semi-aquatiques (Avicennia (palétuvier noir), Acanthus ilicifolius, certaines Justicia…) ou des épiphytes (plantes qui se développent sur un autre végétal ou sur de la roche) telles Clistax, Dischistocalys….
Selon le genre, on peut remarquer la présence de cystolithes (protubérances dû à des cristaux de carbonate de calcium) ou pas. Ils peuvent être présents dans l’écorce, sur les tiges et/ou sur les feuilles. Cette présence ou pas est un des critères d’identification.
Les caractéristiques des feuilles et des fleurs sont tout aussi diversifiées selon le genre et l’espèce.
Principales caractéristiques :
– Feuilles simples sans stipule (appendice membraneux), opposées et généralement décussées (insérées par paires et se trouvant à angle droit sur l’axe avec les organes suivants).
– Fleurs hermaphrodites (bisexuées), irrégulières ou bilabiées (2 parties) ou unilabiées. Généralement, elles ne sont pas parfumées mais développent une bonne quantité de nectar, il faut bien attirer le client.
∙ Généralement, les bractées (organes intermédiaires entre la feuille et le pétale) et les bractéoles (petites bractées) sont particulièrement présentes ; souvent pétaloïdes, elles sont très décoratives.
∙ Les sépales du calice peuvent jouer un rôle déterminant dans la protection des organes sexuels (Acanthus) ou se limitent à de simples petites dents (Justicia) ou bien le calice se présente comme un bourrelet annulaire ou cupulifère (petite coupe) (Thunbergia).
∙ Corolle de 1 ou 2 à 5 pétales libres ou souvent reliés en tube aux lobes évasés dans leur partie supérieure.
∙ 2 à 4 étamines (pièces florales mâles), parfois 1 à 3 staminodes (étamines atypiques et surtout stériles).
∙ 1 ovaire supère (pièces florales insérées au-dessous) à 2 carpelles (loges). La base de l’ovaire est entouré d’un bourrelet nectarifère. Le style (tige reliant l’ovaire au stigmate) se termine par 2 lames ou par 2 lobes stigmatiques (parties réceptrices de pollen).
La pollinisation est assurée par des insectes et des oiseaux (souvent des colibris ou des souimangas selon la région) et même par des chauve-souris. Certaines espèces du genre Ruellia développent des fleurs fermées qui s’autopollinisent, la cleistogamie.
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– Fruits en capsule déhiscente (ouverture spontanée) à 2 valves exceptés les genres Mendoncia et Anomacanthus qui proposent des fruits en drupe. De nombreux membres de cette famille pratiquent l’autochorie en dispersant leurs graines par explosion de leur capsule grâce à l’élasticité de la nervure médiane (généralement), on parle alors de déhiscence explosive ; d’autres espèces améliorent la dispersion des graines par la transformation du funicule (lien très fin reliant l’ovule à la paroi de l’ovaire) en rétinacule (crochet qui soutient les graines) qui fait alors office de catapulte (exception chez Thunbergia). Cela démontre, une fois de plus, la capacité d’innovation du monde végétal !
2 à 4 graines.
– Importance économique en horticulture.
– Importance écologique dans différents habitats pour leur apport en pollen et en nectar mais aussi pour leur feuillage chez le genre Avicennia. Ce sont des plantes hôtes de chenilles de nombreux papillons.
– Médicinales
Certains regrettent que cette famille ne soit pas plus utilisée en égard à ses diverses propriétés autrefois prisées dans les pays d’origine et parfois toujours en cours dans les pharmacopées ayurvédiques, chinoises et africaines.
L’européenne, Acanthus mollis est réputée pour son action anti-inflammatoire, l’Acanthus ebracteatus est très utile en médecine de brousse. Le genre Blepharis (Blepharis edulis) tire son épingle du jeu grâce (entre autres) à ses propriétés aphrodisiaques. L’échinacée d’Inde, Andrographis paniculata, soigne les fièvres et les infections respiratoires et stimule le système immunitaire. L’Hygrophila spinosa traite le foie et les infections urinaires. Justicia adhatoda, le noyer de Malabar, lutte contre les maladies respiratoires et les piqûres d’insectes…
– Alimentaire
Dans certaines régions reculées, les feuilles de l’acanthe molle étaient consommées.
Les graines d’Avicennia sont couramment consommées dans certaines régions ou lors de famine dans d’autres régions. Le miel de l’Avicennia nitida est réputé en Floride et en Afrique de l’ouest. L’écorce de Avicennia marina var. resinifera produit une gomme verte comestible qui, selon certains, serait aphrodisiaque.
Les feuilles de certaines espèces de Thunbergia sont comestibles mais plutôt consommées en temps de disette.
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Pline l’Ancien écrit dans son ouvrage ‘Histoire naturelle’ traduit en français de 1848 à 1850 par Émile Littré :
« L’acanthe est une herbe de ville, et employée dans la topiaire. Elle a les feuilles dressées et longues ; elle revêt les rebords des bassins et les carreaux des parterres. Il y en a deux espèces : l’une (acanthus spinosus, L.), épineuse et frisée, est la plus courte ; l’autre est lisse, et appelée aussi paederos et mélamphyllos (acanthus mollis, L.). La racine de cette dernière est excellente pour les brûlures et les luxations. Mangée cuite, surtout avec la décoction d’orge, elle est très bonne pour les ruptures, pour les spasmes, et pour ceux qui sont menacés de phtisie. Pilée et chaude, on en fait un topique pour les gouttes avec sentiment de chaleur. »
Au 1er siècle av. J.-C., Melamphyllos était l’ancien nom de l’île de Samos en Grèce ainsi que le nom d’une montagne de Thrace ce qui nous ramène aux origines géographiques de l’espèce mollis.
Sous-famille Acanthoideae – Tribu Acantheae
30 espèces dont l’espèce type : Acanthus mollis.
Régions tropicales et tempérées d’Eurasie et d’Afrique.
Europe : 2 espèces méditerranéennes : mollis (la plus connue) au sud de l’Europe et en Afrique du Nord et spinosus dans le bassin méditerranéen ; 1 espèce des Balkans : hungaricus.
– Acanthus L.
Nom donné par Carl von Linné en 1753.
D’après Dioscoride son nom vient d’Akantha, une nymphe qu’Apollon convoitait. Il voulut l’enlever alors elle le griffa au visage. Il se vengea en la métamorphosant en une plante épineuse qui aime le soleil. (dans ce monde-là, ça ne plaisantait pas !)
– Noms des différentes espèces :
∙ Branc ursine ou branche ursine – Bear’s breeches sont des noms vernaculaires (populaires) communs aux acanthes ; il est souvent rajouté l’épithète armed ou spiny pour spinosus.
Branc ursine vient du latin médiéval branca ursina signifiant ‘culotte d’ours’. William Stearn aurait évoqué une référence avec les bractées ressemblant à des ‘griffes d’ours’, d’autres se réfèrent à l’apparence des feuilles qui ressembleraient aux pattes antérieurs d’ours !?
Même référence pour le nom anglais se traduisant par ‘culotte d’ours’. Acanthe en hongrois se traduit par medveköröm signifiant griffes d’ours.
∙ Acanthus mollis L.
Mollis – acanthe molle – du latin signifiant ‘poils doux’ en référence à ses feuilles qui ne piquent pas contrairement à l’espèce spinosus ; certains se réfèrent à ses longues feuilles molles ayant tendance à pendre.
On la trouve aussi sous le nom d’acanthe à feuilles larges en comparaison avec les lobes effilés et très épineux de l’espèce spinosus qui lui ont d’ailleurs donné son nom.
∙ Acanthus spinosus L.
Spinosus du grec signifiant ‘avec épines’ en référence à ses feuilles très piquantes souvent comparées à celles du chardon.
∙ Acanthus hungaricus (Borbas) Baen.
Décrite et nommée longifolius hungaricus par le botaniste hongrois Vincze von Borbas puis renommée en 1896 par le botaniste allemand Karl Gabriel Baenitz.
Synonymes : balcanicus – longifolius exprimant son origine ou ses longues feuilles.
Selon l’espèce, l’habitat est diversifié : désert, steppe, forêt, mangrove (Acanthus ilicifolius)… En France, quand l’espèce mollis n’est pas cultivée, on la découvre sur des friches rocailleuses ou des terres incultes.
Soleil ou mi-ombre selon l’habitat.
Tous types de sol si bien drainés, même caillouteux avec une préférence pour les sols profonds et riches ; tolérance légère au calcaire. Intolérance à l’humidité stagnante surtout en hiver.
Tolérance au gel jusqu’à -15°C parfois jusqu’à -20°C pour les espèces européennes, d’autres espèces africaines ne résistent qu’à -5 à -8°C mais repartent de la souche.
Mollis : régions sèches et rocailleuses du bassin méditerranéen jusqu’à 300 m d’altitude, souvent aux pieds de murs. Tolérance à l’air marin mais n’apprécie pas le vent. Tolérance au gel jusqu’à -15°C mais les gelées tardives peuvent compromettre la floraison. Repart souvent de la souche après un été chaud qui, selon l’exposition, peut la brûler.
Spinosus : préfère le plein soleil.
Hungaricus est l’espèce la plus rustique ; elle fleurit plus tard et de ce fait est moins sensible aux gelées printanières.
L’espèce type est Acanthus mollis.
– Vivace se développant en une rosette buissonnante (suffrutescente), persistante ou semi-persistante selon l’habitat et l’espèce, de 30 cm à 80 cm, atteignant de 1 à 2 m avec la hampe florale comprise pour mollis. Le port des espèces spinosus et hungaricus est plus compacte que mollis.
En régions chaudes, les feuilles sèchent après la floraison, il est préférable de les laisser afin de protéger les bourgeons de la base de la rosette ; la plante renaît après une période de dormance du milieu de l’été à l’automne selon l’espèce : plante hémicryptophyte (les parties aériennes disparaissent durant la ‘mauvaise saison’).
– Racines pivotantes et traçantes, charnues, blanches à l’intérieur ; les rhizomes (tiges souterraines permettant une multiplication végétative) traçants leur conférent parfois un caractère envahissant. Vivant près des mangroves, l’espèce ilicifolius développe occasionnellement des racines échasses.
Les plantes à racine pivotante et à rhizomes n’aiment pas être déplacées et si on tente de les arracher, il y aura toujours un petit bout de racine qui s’échappera prêt à reformer une nouvelle plante.
– Grandes feuilles de 20 à 60 cm, certaines jusqu’à 1 m de long, formant souvent une rosette basale ou parfois verticillées (organes insérés autour d’un axe). Généralement les feuilles sont radicales (naissent au collet de la plante, proche des racines), telles les espèces mollis, spinosus…, elles se développent alors au bout d’un long pétiole (axe reliant la feuille à la tige) ; parfois certaines tiges sont caulinaires (relatif à la tige ou attaché à la tige) et portent des feuilles opposées, plus petites et plus ou moins sessiles (directement sur un axe). Les feuilles florales sont plus petites. Limbe (tissu végétal) sans cystolithes.
Les feuilles sont rarement entières (ilicifolius particulièrement polymorphique) et présentent généralement des lobes plus ou moins profondément découpés selon l’espèce, on les dit pennatifides ; vert foncé brillant, à la nervure centrale bien marquée, souvent de couleur blanchâtre.
L’espèce mollis, comme son nom l’indique, porte de larges feuilles molles que l’on devrait plutôt qualifier de flexibles, elles sont dentées contrairement à d’autres espèces plus ou moins épineuses. Elles ressemblent aux feuilles de la berce (Heracleum, famille Apiaceae), qui d’ailleurs fut nommée autrefois fausse branc-ursine.
L’espèce spinosus est la plus épineuse avec des pointes la faisant ressembler au chardon et des lobes fortement découpés jusqu’à la nervure centrale, ses feuilles sont plus fermes et plus étroites que mollis. Les feuilles de la carline (Carlina acanthifolia, famille Asteraceae) à feuilles d’acanthe, lui ressemblent d’où son nom.
Les feuilles d’hungaricus peuvent atteindre 0,90 m, ses lobes sont plus profondément découpés que mollis et sans épines, la nervure centrale est large.
Les feuilles de certaines espèces ressemblent à celles du houx : ebracteatus, la ‘plante houx’ et ilicifolius, le ‘houx de mer’ parfois considérée comme une variété d’ebracteatus.
– Floraison de la fin du printemps au milieu de l’été selon l’espèce et la région, en une hampe (axe et fleurs) spectaculaire, érigée, cylindrique, généralement terminale, parfois axillaire, hélicoïde, pouvant atteindre jusqu’à 1 m pour mollis. L’inflorescence (grappe de fleurs) porte de nombreuses fleurs, de 30 à 50 jusqu’à 120. Les fleurs inférieures de l’épi se développent en premier.
Fleurs zygomorphes (pétales ou/et sépales disposés bilatéralement) de 3 à 5 cm, hermaphrodites, portées par un petit pédicelle (axe portant une fleur) ou presque sessiles. Elles ne sont pas parfumées.
∙ 3 bractées de tailles différentes protègent la fleur : 1 grande bractée épineuse sous-tendant la fleur, souvent large et longue, de teinte soutenue et 2 petites linéaires pouvant parfois être absentes ; la grande bractée est généralement proéminente et dissimule le sépale inférieur. Les bractées et les sépales sont de même couleur : verts ou vert blanchâtre (dioscoridis, l’acanthe arménienne) ou verts à leur base puis du rose au pourpre pour mollis et spinosus, rose pâle pour hungaricus, rouges pour sennii (espèce rare d’Éthiopie). Les lobes des bractées de spinosus sont effilés et épineux, ceux de carduaceus sont pubescents (poilus).
∙ Calice à 4 sépales libres et inégaux : un sépale inférieur et l’autre supérieur de grande taille formant un casque au-dessus de la corolle et 2 très petits latéraux. Les sépales sont soudés à leur base et les petits sont souvent accrescents (organe, qui après fécondation, continue de se développer jusqu’à faire partie du fruit). Les sépales peuvent être lobés vers le sommet.
∙ Corolle bilabiée : 1 lèvre inférieure large à 3 lobes obtus, la lèvre supérieure est souvent absente ou fortement réduite. À la préfloraison (disposition des pièces florales dans le bouton floral), les 2 lobes latéraux de la lèvre inférieure sont repliés en arrière enserrant les organes sexuels, à maturité ils sont pendants vers l’avant. La corolle est blanche teintée ou nervurée du rose au rouge pourpre pour les 3 espèces européennes, ou rose violet (dioscoride) ou bleu violet (ilicifolius) ou rouge orangé (sennii)…
∙ Les 4 étamines didynames (une paire plus longue que l’autre) sont généralement protégées d’un côté par le sépale supérieur et de l’autre par la lèvre de la corolle à laquelle elles sont attachées à la base, ce dispositif les rend presque invisibles ; ce n’est pas le cas de l’espèce ilicifolius dont les bractées et les sépales sont beaucoup plus réduits. Staminodes absents.
Les épais filets coudés des étamines sont libres mais leurs anthères (extrémités fertiles d’une étamine) sont rapprochées ; mollis à des anthères velues.
∙ Ovaire supère à 2 carpelles surmonté d’un style filiforme au cœur des étamines et les dépassant, au stigmate bilobé ; 2 ovules par loges.
Les pollinisateurs sont l’abeille (particulièrement la charpentière) et le bourdon étant suffisamment imposants pour atteindre le disque nectarifère entourant la base de l’ovaire bien protégé par l’imbrication des bractées et des sépales. Les jardiniers plantent souvent les acanthes près du potager attirant ainsi abeilles et bourdons.
– Fruits en capsules ventrues de 3 à 4 cm, lisses, à 2 loges contenant généralement 4 grosses graines roussâtres à noires et aplaties, très germinatives. L’ovule est rattaché à sa capsule par un funicule qui se transforme en un ressort qui, à maturité, propulse les graines jusqu’à 2 à 5 m du pied mère.
– Multiplication par graines mais peut devenir envahissante si on laisse les graines arriver à maturité. Ces plantes n’apprécient pas les divisions de touffes mais on peut récupérer des rejets.
– Plusieurs cultivars
Le plus étonnant est Acanthus mollis ‘Whitewater’, un hybride cultivé aux feuilles panachées, au pédoncule rose pourpre et aux fleurs blanches à blanc rosé.
– Ennemis : oïdium, limaces et escargots.
– Ornementales
En bordure de parterres, en haies, en clôtures défensives ; en Éthiopie, l’espèce sennii est cultivée en haies pour protéger les potagers.
– Médicinales
Au XVII° siècle, on la considérait comme faisant partie d’une trousse de premiers soins.
Digestion, diarrhée, brûlure, inflammation, cicatrisation, antidiabétique, traitement de l’asthme ; les graines de l’espèce ebracteatus d’Asie tropicale seraient efficaces contre les furoncles ; l’espèce ilicifolius contre l’asthme et les rhumatismes…
– Bouquets de fleurs frais ou secs.
– Racines
Autrefois, on obtenait un pigment de couleur jaune pour teindre les textiles à partir de la racine de l’espèce mollis.
Les racines servaient à fabriquer des brosses de style chiendent.
– Avec les cendres d’ilicifolius, on fabriquait des savons.
– Mellifères et nectarifères, elles offrent un intérêt écologique.
– Mythologie grecque : Akanta, nymphe d’Apollon, voir au nom.
– Symboles
∙ Symbole de puissance, du contrôle face aux épreuves en référence à sa rusticité et aux épines défensives de certaines espèces.
∙ Langage des fleurs : grand amour pour les arts – relation solide.
∙ L’espèce ebracteatus est censée éloigner les mauvais esprits.
– Représentation artistique et stylistique
La feuille d’acanthe a inspiré de nombreux artistes qui l’ont beaucoup représentée en sculpture mais aussi sur d’autres supports : meubles ou petits objets (boites, vases…).
Cette représentation a encore la cote puisqu’on l’a retrouvée sur un des trophées de la coupe du monde de judo en mai 2023 sous la forme d’une grande bonbonnière en porcelaine à grosses anses en feuille d’acanthe offerte aux équipes médaillées, ou encore comme motif pour papiers peints, un des plus connu créé en 1875 et toujours produit à notre époque est celui du designer William Morris.
Ce symbole fut aussi apprécié en peinture ou en broderie sur des vêtements. En évoquant Hélène, Virgile parle de ses vêtements brodés de feuilles d’acanthe.
Sculpture :
La légende veut que le sculpteur grec Callimaque soit le premier à avoir représenté l’acanthe sur les chapiteaux de l’ordre corinthien après avoir admiré des feuilles naissantes dans un cimetière sur la tombe d’une jeune fille, toutefois des représentations artistiques très proches existaient déjà depuis l’Égypte antique sous la forme d’un motif artistique plat appelé ‘la palmette’ censé ressembler aux feuilles en éventail d’un palmier.
Les feuilles découpées d’Acanthus mollis et spinosus ont inspiré les artistes Grecs puis les Romains qui se sont enthousiasmés pour sa représentation. On peut retrouver des motifs sculptés sur les colonnes des chapiteaux corinthiens ou des églises romanes ainsi que sur des sculptures murales en Inde. Ce succès s’étendit jusqu’au début du XIXe siècle avec une apogée durant la renaissance italienne du XIVe au XVIe siècles.
Une des sculptures les plus connues est celle des ‘Danseuses de Delphes’ trouvée à Delphes (site au pied du mont Parnasse au centre de la Grèce) ; cette représentation aurait inspiré Claude Debussy pour son premier prélude pour piano.
En photo : à Bruxelles, sur la Grand Place, on peut admirer la Maison du Roi d’Espagne dont le chapiteau de la tour-lanterne est orné de feuilles d’acanthe dorées et surmonté d’une statue de la ‘Renommée’, divinité grecque allégorique représentant la reconnaissance publique et sociale, femme ailée messagère de Zeus sonnant la trompette pour révéler les hauts faits ou les crimes des hommes.
De nombreux édifices ou simplement des habitations anciennes sont ornés de frises ou de piliers sculptés à leur sommet de feuilles d’acanthes stylisées.
– Les acanthes ont aussi inspiré les écrivains.
Odes et ballades de Victor Hugo :
« Voici la fête d’Olympie !
Tressez l’acanthe et le laurier !
Que les dieux confondent l’impie !
Que l’antique audace assoupie
Se réveille au cœur du guerrier ! »
Mise à jour Mai 2023.