Les feuilles (ou palmes ou frondes) sont produites à partir du bourgeon terminal, le phyllophore (voir à Racines et Stipes). L’ensemble des feuilles est une frondaison, on parle aussi de couronne et parfois même de houppier comme pour les arbres. Elles peuvent être érigées ou arquées ce qui aide à l’identification.
Les feuilles se développent généralement dans un ordre spiralé (nombre de spirales différent selon le genre mais obéissant à la loi de Fibonacci). Les anciennes et les nouvelles feuilles offrent un aspect en bouquet.
Certains palmiers développent leurs feuilles de façon particulière, c’est le cas du palmier triangle de Madagascar, Dypsis decaryi dont les feuilles disposées sur trois axes lui confèrent une allure semblable au Strelizia nicolai ou à l’arbre du voyageur, Ravenala madagascariensis, tous deux de la famille des Strelitziaceae.
Les feuilles des palmiers sont persistantes, elles ont généralement une durée de vie de 3 à 7 ans. Un palmier produit moins de feuilles qu’un arbre mais elles sont généralement de très grandes tailles, ce sont d’ailleurs les plus grandes feuilles du monde végétal, on peut citer la feuille palmée du Corypha umbraculifera de 3 m sur 2 m formant une ombrelle pouvant abriter plusieurs hommes ou celle du palmier à huile Elaeis guineensis de 3 à 5 m ou encore celle de 8 m de long du palmier d’Amazonie Manicaria saccifera, ce qui est déjà étonnant, mais le botaniste français Francis Hallé a découvert en République du Congo une feuille pennée du palmier africain Raphia regalis qui mesurait 25 m de long dont un pétiole de 7 m, presque 5 m de large et pesait plus de 100 kg ! C’est à peine croyable si l’on compare cette taille à la hauteur d’un immeuble et si vous doutez, n’hésitez pas à consulter les photos du site https://www.vadearboles.com/la-hoja-de-arbol-mas-grande/.
À l’émergence, la feuille se déploie repliée sur elle-même longitudinalement et forme une fine et longue tige appelée ‘lance’ à ce stade de développement.
Le limbe (composé de folioles) est porté par un pétiole (tige) dont la base forme en partie le stipe.
Généralement vert, le pétiole de Cyrtostachys est rouge vif, ceux de certains Phoenix (dactylifera, iberica…) et Borassus sambiranensis sont jaunes…
Le pétiole est généralement long, voire très long jusqu’à 1 m chez Roystonea, de 1,50 m à 2 m chez Washingtonia, jusqu’à 7 m chez les Raphia.
Certaines espèces développent un pétiole particulièrement solide, lourd et dur, c’est pourquoi dans certains pays, on avise la population des chutes probables de palmes !
Il peut être lisse (Jubaea, Sabal…) ou tomenteux (Trachycarpus martianus, certains Brahea…) ou filamenteux ou/et muni d’épines (système de défense) issues d’une modification des segments.
L’aspect du pétiole permet de distinguer des espèces ou des genres très proches, exemples : le pétiole est lisse ou très légèrement denté chez Trachycarpus fortunei à contrario du Chamaerops humilis dont le pétiole est muni de petites pointes érigées très acérées, celui de Washingtonia filifera est légèrement denté à la base et celui de Washingtonia robusta et de leur hybride filibusta porte des épines féroces tout le long, tout comme le palmier aiguille ou palmier-porc-épic Rhapidophyllum hystrix aux longues épines noires longtemps persistantes qui peuvent s’entremêler avec les gaines le rendant assez dangereux. La présence d’épines sur le pétiole est une protection supplémentaire à l’encontre des animaux herbivores qui pourraient menacer le bourgeon terminal, le phyllophore.
Chez certaines espèces à feuilles pennées, les folioles de la partie basse du pétiole se développent en épines plus ou moins longues (autrefois appelées acantophylles). Là encore, on peut différencier certaines espèces selon leurs épines, par exemple la base du pétiole du Phoenix dactylifera est moins épineuse que celle du Phoenix canariensis.
C’est la partie large et étalée d’une feuille constituée d’un tissu végétal apte à capter l’énergie lumineuse par ses cellules photosynthétiques.
Le limbe des feuilles est recouvert d’une cuticule (peau) efficace qui réduit la perte d’humidité et l’empêche ainsi de se dessécher rapidement ; les feuilles de certains palmiers de régions très ensoleillées sont recouvertes d’une cuticule cireuse qui les protège du soleil ardent et donc des excès de température.
Le limbe est généralement lisse mais certaines rares espèces se couvrent d’épines (Aiphanes) ; le limbe est vert ou parfois gris bleuté tel celui du palmier Bismarckia, du Brahea armata, de certains Butia…, cette couleur est due à leur cire ; les espèces du genre Astrocaryum ont le revers blanchâtre, celles du Geonoma epetiolata et certaines du genre Pinanga sont mouchetées… Certaines rares espèces produisent des feuilles juvéniles rouges à rouges-cuivrées, par exemples le palmier de Nouvelle-Calédonie Chambeyronia macrocarpa aux feuilles pennées ou le palmier chou d’Australie Livistona mariae aux feuilles palmées juvéniles rouge-cuivre et aux adultes vert-bleuté.
Les feuilles des palmiers présentent de grandes différences, elles peuvent être palmées (en éventail), pennées (en plume) ou parfois entières mais contrairement à ce que notre œil nous indique, les feuilles des palmiers sont entières !
En fait, dans le monde végétal (et pas que !), tout se décide au sein de la plante embryonnaire : les folioles (divisions) des feuilles composées de plantes tels le robinier, le marronnier… sont déjà formées dans l’embryon, alors que chez les palmiers la feuille embryonnaire est toujours entière, la plantule développe une feuille juvénile, une éophylle, au limbe entier (ou parfois bifide), caractéristique des monocotylédones ; certaines espèces du genre Euterpe échapperaient à cette règle.
Cette feuille juvénile est composée de folioles appelées segments ou pinnules, unies et reliées les unes aux autres comme une plume ou plissées comme un éventail, mais à partir de la 2ème ou 3ème année de la plante, les cellules reliant les segments des nouvelles feuilles commencent à s’autodétruire, c’est l’apoptose très active sur les segments d’une plante bien installée, libérant, selon l’espèce, plus ou moins longuement les segments, cela peut être d’ailleurs une approche d’identification. En botanique, le terme apoptose est surtout utilisé pour expliquer la chute des feuilles à l’automne mais la séparation des segments est aussi une apoptose, une mort cellulaire programmée.
Sur les photos ci-dessous on remarque l’entièreté de la feuille d’un jeune Chamaerops et la feuille pennée d’un palmier adulte dont les liens qui réunissaient les sommets des folioles sont encore présents après l’apoptose longitudinale.
Les feuilles présentent donc des formes différentes, c’est un des critères d’identification. Dans un même genre, on retrouve assez fréquemment la même morphologie mais certains genres présentent parfois une ou quelques espèces d’architecture différente.
– Entière
Une feuille entière de palmier ne subit pas d’apoptose ; elle peut être parfois bifide ou trifoliée selon l’espèce.
Les palmiers à feuilles entières ne sont pas légion mais on peut citer quelques espèces : certains Chamaedorea et Geonoma, le Bactris obovata aux larges feuilles bifides, le Dypsis hildebrandtii de Madagascar dont les juvéniles peuvent être rouges, le palmier Joey Johannesteijsmannia altifrons avec de remarquables feuilles à nervures pennées de 4 à 6 m de long émergeant du sol, ou encore le palmier cuillère de l’archipel du Vanuatu, le Licuala grandis, à nervures palmées ou plus précisément costapalmées (voir plus loin).
Bien souvent, l’entièreté des feuilles est mis à mal par le vent qui sépare leurs segments ; on retrouve ce phénomène chez les bananiers dont les segments ne subissent pas d’apoptose, les grandes feuilles de certaines espèces de palmiers (ex : Pelagodoxa henryana) ressemblent d’ailleurs aux feuilles des bananiers.
En France, les palmiers à feuilles entières ne sont visibles qu’en serre ou en intérieur (très prisés).
– Palmée (ou flabellée, en éventail)
Concernant les feuilles palmées, il est d’usage de parler de segments plutôt que de folioles.
À partir de l’apex (sommet) du pétiole, les segments de la feuille se développent en éventail comme les doigts de la main.
L’apoptose, séparation des segments, est plus lente que chez les espèces à feuilles pennées et elle est souvent incomplète : chez Chamaerops et Trachycarpus, la séparation s’effectue parfois jusqu’au point de ralliement mais chez les Washingtonia, elle n’opère que sur les 2/3 ou sur la moitié du limbe ; les segments libres restent érigés ou pendants selon l’espèce. Certains palmiers gardent les traces des séparations des segments par la présence de filaments accrochés aux bords des segments, c’est souvent le cas chez les Washingtonia et encore plus pour l’espèce filifera.
Hastula
Une protubérance à la jonction du pétiole avec le limbe, une sorte de ligule appelée hastula (petite tige) peut se développer uniquement chez certaines espèces palmées ou costapalmées. L’hastula est une insertion consolidante du pétiole sur le limbe, elle apparaît sur la face supérieure (adaxiale) ou inférieure (abaxiale) ou des deux côtés du limbe ; au revers les bords avoisinants de l’hastula peuvent être tomenteux (duvet feutré), c’est un critère d’identification. On assimile son rôle à celui de la consolidation d’un manche avec une pelle de qualité.
Chez Washingtonia elle est de forme triangulaire, chez Trithrinax, Chamaerops et Trachycarpus… elle forme un petit ourlet circulaire plus ou moins prononcé du côté adaxiale. On peut différencier les deux espèces de Washingtonia, très présentes sur la Côte d’Azur, en observant l’hastula qui est courte et aux bords tomenteux sur le dessous chez robusta et plus longue et aux bords glabres chez filifera.
– Costapalmée
C’est un intermédiaire entre une feuille palmée et une pennée. La feuille est palmée mais les segments sont plus ou moins rattachés à un rachis central (costa) comme chez les palmiers à feuilles pennées. Le costa est généralement assez court mais, chez les Sabal, il peut être très long. Chez les palmiers costapalmés, le limbe semble être en deux parties ce qui lui donne un aspect particulier. C’est une caractéristique des genres Sabal, Brahea, Hyphaene, Livistona, du palmier endémique de Madagascar Bismarckia nobilis, du palmier mazari Nannorrhops ritchieana… Les Washingtonia, dans une moindre mesure, peuvent être légèrement costapalmés.
– Pennée (en plume)
Concernant les feuilles pennées, il est d’usage de parler de folioles ou de pinnules plutôt que de segments.
Ce type de feuilles ressemble à une plume ; elles sont les plus longues et les plus larges de toutes les plantes du monde végétal.
Chez les palmiers à feuilles pennées, la séparation des pinnules est rapidement facilitée par la croissance du rachis qui éloigne leurs points d’insertion les uns des autres.
Le pétiole est prolongé par un axe central, le rachis, épine dorsale de la feuille plus ou moins dressé ou arqué selon le genre ou l’espèce, sur lequel les folioles sessiles s’insèrent de part et d’autre de façon opposée ou en alternance ou en bouquets de 2 ou 3 folioles, parfois sur des angles différents ce qui leur donne un côté échevelé, particulièrement Syagrus romanzoffiana. La disposition des folioles est un critère d’identification.
Quelques exemples de palmiers à feuilles pennées : Butia, Phoenix, Syagrus, Jubaea, Roystonea, Cocos, Calamus, la majorité des Raphia et des Chamaedorea…
Le genre Caryota ou palmiers ‘queue-de-poisson’ est le seul à proposer des feuilles bipennées, c’est-à-dire avec une double rangée de pinnules ; le rachis principal développe des rachis secondaires portant de larges pinnules accolées aux nervures principales peu marquées.
La foliole est constituée d’une lame de tissu séparée par une nervure centrale généralement prépondérante ; elle est plus ou moins large, linéaire ou lancéolée. L’apex des folioles est aigu ou obtus. Il n’est pas rare de voir l’apex s’échancrer, surtout dans une situation venteuse, leur donnant un aspect nettement bifide ; il arrive même que la pinnule s’échancre à la base le reliant au rachis.
La feuille de certains palmiers est composée de folioles accolées irrégulièrement ; cela concerne aussi bien les feuilles palmées que les feuilles pennées.
À leur point d’insertion sur le rachis, les deux côtés de la lame sont plus ou moins repliés, cette caractéristique permet à l’eau d’être retenue vers le pied de la plante mais aussi d’assurer une photosynthèse efficace des deux côtés du limbe ainsi qu’une meilleure résistance aux vents. Cette disposition prédéfinie caractérise généralement le genre auquel les palmiers appartiennent même si, chez certains genres, l’insertion n’est pas si évidente (ex : Chamaedorea) et ressemble aux familles très proches telles les Cycadaceae ou les Zamiaceae dont le point d’attache à plat n’est replié ni d’un côté, ni de l’autre.
∙ Indupliqué
Si les folioles des palmiers se replient vers le haut en gouttière, en forme de V, on les dit ‘indupliqués’, c’est le cas des palmiers à feuilles palmées de la sous-famille des Coryphoideae (excepté le genre Guihaia aux folioles rédupliquées) ainsi que des deux genres Arenga et Caryota de la tribu des Caryoteae aux feuilles pennées et bipennées, très légèrement indupliquées, et surtout des Phoenix aux feuilles pennées ce qui permet de les différencier facilement des autres genres à feuilles pennées.
∙ Rédupliqué
Si les segments se replient vers le bas en forme de toit ∧, on les dit ‘rédupliqués, c’est la majorité des palmiers de la sous-famille des Arecoideae à feuilles pennées ainsi que la sous-famille des Calamoideae à feuilles pennées.
Quelques autres exemples : Cocos nucifera, Butia, Jubaea, Syagrus…
Ainsi on distingue facilement les genres par la disposition indupliquée ou rédupliquée de leurs folioles.
Mise à jour le 10 septembre 2024.