Les Ficus sont des plantes à fleurs de la classe des angiospermes. Tout comme le mûrier – Morus, ce genre fait partie de la famille des Moraceae.
On compte plus de 800 espèces recensées.
Toutes les régions chaudes et tempérées du monde entier.
– Ficus L.
Ficus est le nom attribué par Carl von Linné en 1753.
Selon les auteurs, l’origine du nom Ficus présente plusieurs versions.
∙ La plus plausible vient de l’universitaire néerlandais Gérard Vossius (1577-1649) pour qui ce mot serait issu du vieux latin ficus, fici de l’hébreu fag signifiant nourriture, aliment.
∙ En grec, la figue se dit ‘sukon’ ou ‘sykon’ du grec ancien ‘syko’ et le foie se dit ‘hépar’. Dans l’Antiquité, les grecs préparaient un foie gras délicieux en gavant leurs oies avec des figues. Ils le nommaient ‘hepar sukôton’ c’est à dire ‘le foie de figues’ qui fut traduit en latin par jecur ficatum. Les anciens romains copièrent ce plat et n’ont gardé que la traduction du mot grec ‘sukon’ en latin soit ficatum. Ce nom se transforma en figido puis en foie.
– Tous les Ficus pourraient avoir le nom vernaculaire (populaire) de figuier mais en fait dans la langue courante ce n’est pas le cas. Par exemples :
∙ Ficus carica est considéré comme le figuier commun; beaucoup assimilent le nom figuier uniquement à cette espèce.
∙ Certains Ficus, tel Ficus benjamina, gardent leurs noms latins.
∙ Ficus elastica se nomme caoutchouc.
∙ En Inde, les Ficus sont communément appelés banyan mais à l’origine c’était plutôt le nom commun de l’espèce benghalensis. Banyan ou banian est le nom d’une caste hindoue de commerçants qui avaient pour habitude de s’abriter sous leur ombre.
∙ Plusieurs espèces ont la réputation et le nom commun de figuier étrangleur; le plus connu sous ce nom est le Ficus macrophylla qui débute souvent sa vie comme une plante épiphyte (qui se développe sur un autre végétal) et qui, tôt ou tard, en grandissant finit par étrangler son hôte.
∙ Les figuiers endémiques des Mascareignes sont nommés affouches.
∙ Un cactus du genre Opuntia porte le nom vernaculaire de figuier de Barbarie en référence à ses fruits comestibles (d’où la nécessité d’utiliser les noms en latin).
Les figuiers s’installent absolument n’importe où ! Cela peut être sur un autre arbre (de n’importe quel genre) c’est pourquoi certaines espèces sont dites épiphytes, ou bien entre des interstices rocheux ce qui est souvent le cas pour ‘notre figuier commun.
Ils aiment le soleil et beaucoup apprécient une atmosphère chaude et humide sur des sols plutôt riches et bien drainés. Hormis en région méditerranéenne, en France, ils sont cultivés en serres ou en intérieur; seule l’espèce carica peut être mise en pleine terre mais dans des situations abritées.
– Les deux caractéristiques principales des ficus sont :
∙ La production d’un sycone (réceptacle floral replié sur lui-même formant ainsi une cavité intérieure fermée contenant les fleurs), de formes différentes selon l’espèce, pour assurer l’inflorescence (grappe de fleurs) et la fructification.
∙ La production d’un latex irritant pour l’homme, voire toxique. Le latex est une substance liquide plus ou moins épaisse circulant dans des vaisseaux spécialisés appelés canaux laticifères. Il assure les défenses naturelles de la plante. Le latex s’écoule suite à une blessure et au contact de l’air il se solidifie et forme ainsi une barrière protectrice.
– La croissance est relativement rapide. La longévité peut se compter en siècles, de 150 à 300 ans.
– Les figuiers présentent des formes et des tailles variées : de l’arbrisseau à l’arbre de 30 à 40 m mais aussi des lianes tapissantes tels Ficus pumila et Ficus rostrata.
– De nombreuses espèces produisent des racines aériennes qui leur permettent d’avoir un rôle de plante semi-épiphyte (plante qui s’installe sur une autre).
La graine germe sur une autre plante ou au creux de n’importe quelle cavité ; quand les racines adventives (à partir d’une position atypique) aériennes touchent le sol et s’enracinent, la plante devient indépendante de son arbre porteur; bien souvent ce dernier meurt étouffé par manque de lumière d’où le surnom de ‘figuier étrangleur’.
Le banian – Ficus benghalensis – du jardin botanique de Howrah à Calcutta, est âgé d’au moins 200 à 250 ans. Le tronc initial est mort mais il a développé plus de 2 000 racines adventives qui forment une forêt. Sa circonférence couvre un demi-kilomètre et son diamètre est de 130 m.
Alexandre le Grand aurait campé avec son armée entière à l’ombre d’un de ces banians-forêts.
– Les feuilles sont persistantes ou semi-persistantes ou caduques. Elles sont simples, pétiolées (axes reliant la feuille à la tige), de formes variées, entières ou palmées, souvent coriaces, en position alterne ou spiralée, souvent protégées avant leur développement par une grande stipule (appendice membraneux) caduque.
– Les figuiers sont des plantes monoïques (fleurs mâles et femelles séparées sur la même plante) ou dioïques (fleurs mâles et femelles séparées sur 2 plantes différentes).
∙ Vous ne verrez jamais de fleurs sur un figuier car elles se développent cachées à l’intérieur d’un réceptacle appelé sycone qui deviendra, après fécondation, la future figue.
La figue est donc un faux-fruit puisque par définition un fruit résulte de la fécondation d’une fleur. Le pseudo-fruit est donc issu de la transformation d’une inflorescence, c’est une infrutescence.
Le sycone, ensemble de fleurs tournées vers l’intérieur, devient charnu quand les fleurs sont pollinisées. Les sycones sont pédonculés (axes portant une fleur ou une inflorescence) ou sessiles (directement sur un axe) ; ils se développent en isolé à l’aisselle des feuilles ou par paires ou en grappes, sur les rameaux, les branches ou le tronc.
∙ La fleur mâle apétale est pédiculée (petit pédoncule) – le calice est de 2 à 5 lobes lancéolés – les filaments libres des étamines (pièces florales mâles), de 1 à 6, ont la même longueur que le calice et portent chacun des anthères (extrémités fertiles d’une étamine) à 2 loges.
∙ La fleur femelle apétale est très légèrement pédiculée – le calice est divisé généralement en 5 lobes lancéolés et pointus – le style (tige de l’organe femelle reliant l’ovaire au stigmate) est long ou court (caractéristique très importante pour la suite des événements), courbé et se termine par 2 stigmates (extrémités supérieures du style) inégaux.
∙ La pollinisation est assurée par des guêpes lilliputiennes, des hyménoptères le plus souvent de la famille des Agaonidae qui pénètrent par une ouverture, l’ostiole du sycone.
L’interrelation entre les insectes et les figuiers remonterait à plusieurs millions d’années ! De ce fait, si certaines guêpes sont susceptibles de polliniser différentes espèces de figuiers, d’autres se sont spécialisées au fil du temps et, en général, à chaque espèce de Ficus correspond un genre et une espèce de pollinisateur.
Par contre, d’autres espèces de guêpes parasitent le sycone de certains Ficus sans pour autant assurer de pollinisation ; des profiteuses, quoi !
Concernant particulièrement l’espèce carica, le figuier commun de nos régions :
Certaines variétés sont unifères (fructifie une fois par an), d’autres bifères (fructifie deux fois par an). En région méditerranéenne, certaines variétés de Ficus carica produisent des figues à la fin de l’été matures au printemps puis à l’automne matures à la fin du printemps et enfin au printemps matures en été.
L’homme a créé des variétés parthénocarpiques qui produisent des fruits matures sans passer par la pollinisation et la fécondation.
Lorsque l’arbre est dioïque, le figuier dit mâle est nommé caprifiguier et le figuier femelle, figuier domestique.
Le caprifiguier malgré son nom de figuier mâle possède des fleurs des deux sexes. Les fleurs femelles arrivant à maturité avant les fleurs mâles, il n’y a pas d’autofécondation. Il faut donc à proximité un figuier femelle dont les fleurs femelles seront pollinisées et dont les fleurs mâles sont stériles.
Les fleurs mâles du caprifiguier, peu nombreuses, sont installées au niveau interne de l’orifice du sycone, l’ostiole protégé par des écailles. Les fleurs femelles tapissent le reste de la paroi interne de la cavité. La structure des fleurs femelles du caprifiguier, pistil au style court, permet à l’insecte femelle de pondre des œufs près de l’ovule qui se transforme alors en galle contenant la larve. Les larves des insectes parasitent une bonne partie de ces fleurs femelles et arrivent ainsi à éclosion. En fait, les caprifiguiers sont des figuiers pouponnières d’insectes.
Les insectes mâles, non ailés, éclosent avant les femelles ailées; aussitôt, ils se mettent en quête des femelles encore dans leur galle; ils percent la galle et sans plus attendre fécondent les femelles encore coincées ! Ils ont toutefois la délicatesse de les aider à sortir définitivement de leur galle.
Au même moment, les fleurs mâles du caprifiguier sont matures et chargent de pollen les insectes femelles fécondées qui sortent de la figue par l’ostiole; la traversée des écailles de l’ostiole étant difficile, les insectes mâles aident à nouveau les femelles en cisaillant les écailles puis finissent par mourir d’épuisement; ils ne verront jamais le jour ! La vie d’un mâle n’est pas toujours facile…
Ces insectes femelles iront indifféremment dans les faux-fruits d’un figuier mâle ou d’un figuier femelle où elles assureront la pollinisation. Celles qui choisiront un figuier femelle se heurteront à une grosse disconvenue car les fleurs de ce type de figuier au long style, ne leur permettent pas de pondre des œufs par contre l’arbre y trouve son avantage car ses fleurs pollinisées arriveront à maturité et produiront des fruits. Quant aux figues du caprifiguier, ayant été largement parasitées, elles restent en général petites et tombent avant d’arriver à maturité.
Les espèces monoïques régulent le développement des larves des insectes afin de limiter le parasitage et d’assurer une pollinisation suffisante donc une fructification. De nombreuses espèces développent dans le sycone, des fleurs mâles et des fleurs femelles à long style et à court style.
– Les vrais fruits du figuier à l’intérieur du sycone sont des akènes (fruits secs indéhiscents dont la graine unique n’est pas soudée à son enveloppe) ; ce sont ces minis graines qui crissent sous les dents. Chaque akène ne contient qu’une seule graine.
Les animaux, y compris l’homme, friands de figues sont responsables de la dispersion des graines mais les principaux disséminateurs sont les oiseaux parfois les chauves-souris, les lémuriens, les chimpanzés…
– Multiplication par graine, ou marcottage aérien.
Le figuier est cultivé par l’homme depuis des millénaires. Lors de fouilles réalisées sur le site de Gilgal en Israël (entre autres), ont été retrouvées des figues carbonisées datant de 11 400 ans. Ces figues provenaient de variétés parthénocarpiques probablement de l’espèce carica, la plus comestible.
– Alimentaire
La figue est considérée comme un des plus anciens ‘fruits’ cultivés, si ce n’est le plus ancien.
Tous les Ficus ne produisent pas de figues comestibles. Celles au goût peu apprécié sont consommées comme farine en temps de famine ou cuites comme légumes ou encore en boisson alcoolisée. Les plus consommées pour leur goût sont principalement celles de l’espèce carica mais la figue est fragile et s’exporte mal, elle est souvent consommée sur son lieu de culture.
– Le latex produit par la plante permet la fabrication de caoutchouc mais la qualité est inférieure à l’hévéa – Hevea brasiliensis qui est préféré.
– Gomme laque
La gomme des Ficus est une résine d’origine animale, exsudat des cochenilles Kerria lacca, récoltée sur Ficus benghalensis et Ficus religiosa.
– Médicinales.
– Cosmétiques : fragrance – nettoyant – exfoliant – hydratant – apaisant.
– Bois
∙ Autrefois, le bois du Ficus sycomorus était utilisé pour confectionner des tombeaux en Egypte.
∙ Les fibres du banian ‘tapa’ – Ficus proxila, originaire de Polynésie, servent à la fabrication de tissus fins; en Inde, on en fait du cordage.
∙ En Inde, le bois est utilisé pour fabriquer de la pâte à papier.
– Teintures.
– Écologie
Les figues sont une nourriture appréciée par divers animaux. Elles font le bonheur des oiseaux et des chauve-souris ainsi que des lémuriens ou des singes; les feuilles sont broutées par les éléphants.
– Ornementales en extérieur et en intérieur ainsi qu’en bonsaï.
Les ficus sont considérées comme des plantes dépolluantes d’où leur attrait dans nos habitations. Par contre, le feuillage peut se révéler toxique pour nos animaux de compagnie comme le chat.
– Symboles
∙ Ficus benghalensis est l’arbre national de l’Inde.
Les armoiries de l’Indonésie représentent, entre autres, un banyan qui image les nombreuses racines culturelles.
∙ Symbolise la volonté de survie car de nombreuses espèces s’installent aussi bien au creux d’un rocher qu’à l’embranchement d’un arbre, de plus l’enracinement des racines adventives les rendent éternels.
∙ Représentations symboliques dans plusieurs religions. Chez les bouddhistes, Ficus religiosa est l’arbre sous lequel le Bouddha Sâkyamuni atteint l’illumination.
– Légende
Les romains associent le Ficus ruminalis à la création de Rome. La légende veut que Romus et Remulus, enfants jumeaux de la princesse Rhéa Silvia et du dieu Mars, soient allaités par une louve puis découverts par un berger au pied d’un figuier sauvage à l’entrée d’une grotte sur la colline du Palatin. Lorsque l’arbre se dessécha, la ville de Rome le vécut comme un très mauvais présage !
Ce figuier sauvage fut nommé Ficus ruminalis mais on peut supposer que c’était une forme sauvage du Ficus carica.
Ruminalis du latin rumis, ruma signifiant tétine, sein en référence à la mythologie de la création de Rome. La déesse Rumina symbolise l’allaitement.
– Divers textes littéraires
∙ La figue était déjà évoquée sur les fresques égyptiennes et dans leurs textes.
∙ Elle est aussi souvent évoquée dans divers textes religieux.
La feuille cache-sexe d’Adam et Ève serait celle d’un figuier. Quant au fruit défendu, ‘l’arbre de la connaissance du bien et du mal’ serait représenté par un pommier pour les chrétiens et par un figuier pour les juifs mais dans d’autres traditions comme en Arménie c’est la grenade.
∙ Dans les Misérables, Victor Hugo écrit : « Les maisons royales ressemblent à ces figuiers de l’Inde dont chaque rameau, en se courbant jusqu’à terre, y prend racine et devient un figuier. »
∙ De tout temps, l’homme a fait l’éloge de la figue. Pour exemple, un savoureux passage dans le livre ‘Le trottoir au soleil’ de Philippe Delerm :
« La figue, c’est la fin d’été. Au hasard des jardins, on les a vues sous les feuilles plates, largement découpées, devenir de petites montgolfières sans nacelle qui rêveraient du sol et non du ciel. On les a touchées au passage quelquefois, pour sentir ce moment où l’élasticité fait place à un commencement de douceur duveteuse, de mollesse dans la consistance. Le vert a pâli, comme irradié d’une lumière intérieure jaunissant les nervures apparentes désormais. Puis est venu cet impalpable cheminement vers le mauve, en quelques jours. Alors on sait qu’il faut les cueillir… »
– L’expression mi-figue, mi-raisin vient de Ficus carica.
Au XVe siècle, des marchands Corinthiens (Corinthe était une des plus importantes cités de la Grèce antique) cachèrent des morceaux de figues séchées, moins chères, dans leurs sacs de raisins secs. Les Vénitiens découvrirent la supercherie mais étant malgré tout satisfaits de leurs achats, ils eurent un sentiment mitigé d’où l’expression mi-figue, mi-raisin.
Mise à jour le 25 octobre 2023.