Le genre Castanea fait partie des plantes à fleurs – les angiospermes, de la famille des Fagaceae qui ne comporte que des plantes arborescentes tels les chênes – Quercus et les hêtres – Fagus…
C’est l’ancienne famille des amentacées créée par Antoine Laurent de Jussieu – les plantes à chatons ; c’est aussi l’ancienne famille des cupulifères créée par Louis Claude Richard : une cupule est issue de la couronne de bractées (organes intermédiaires entre la feuille et le pétale) qui entoure les organes sexuels de la fleur.
On compte environ 12 espèces. En Europe, la plus connue est l’espèce sativa.
Exemples de cupules de cette famille :
– Europe méridionale et tempérée avec la seule espèce Castanea sativa.
Il est supposé qu’en France, lors des dernières glaciations (-10 000 ans), cette espèce s’est réfugiée partiellement dans des régions plus au sud tels la Corse, les Cévennes, le massif des Maures et les Pyrénées orientales. Quand le climat devint plus clément, elle a réinvesti de nouveaux territoires grâce à l’homme car les fruits sont bien trop lourds pour être dispersés à de longues distances. Elle fut réintroduite en Gaule par les légions romaines.
En provenance de l’est de la Turquie, elle s’est renaturalisée en Europe tempérée et méridionale du Portugal au Caucase et en Afrique du Nord.
– Asie avec 2 espèces : l’espèce chinoise Castanea mollissima et l’espèce japonaise Castanea crenata.
On trouve en Asie un genre voisin à feuilles persistantes, le Castanopsis.
– Amérique : plusieurs espèces dont la plus connue Castanea dentata.
– Castanea Mill.
Ce genre a été décrit et nommé officiellement, en 1754, par Philip Miller.
Castanea est issu du latin castanis dérivé du grec ‘kastanon’ désignant l’arbre et le fruit de la châtaigne. Cette appellation viendrait de la ville antique Castanis dans l’ancienne Turquie, réputée pour ses châtaignes (qui lui auraient, d’ailleurs, peut-être donné ce nom) mais une autre version évoque la légende de la nymphe Néa.
– Le nom vernaculaire châtaignier vient de castanea.
Ce genre forme des forêts en régions tempérées, en plaines ou en basses montagnes jusqu’à 800 m et sur les pentes de montagnes jusqu’à 2 500 m pour certaines espèces, sur des sols profonds, légers, riches, acides ; certaines tolèrent un sol aride.
Selon l’espèce, on les trouve en plein soleil ou à mi-ombre. Tolérance au gel de -15°C jusqu’à -30°C.
Concernant l’espèce sativa : cette essence particulièrement méridionale apprécie, toutefois, une certaine fraîcheur.
En France, elle affectionne les vallons au sol acide de l’Ardèche, de 350 à 750 m d’altitude. On la trouve sur les versants humides du Massif des Maures mais aussi dans Le Limousin, le Périgord et la Bretagne, sur un sol profond, pauvre et acide, ni calcaire ni inondé ni trop sec.
Elle affectionne le soleil mais avec une préférence à mi-ombre pour les plants juvéniles.
Sa tolérance au gel atteint jusqu’à -15°C mais elle est sensible aux gelées précoces d’automne.
Le châtaignier sauvage est plus petit aussi bien en taille qu’en grosseur de fruits que le châtaignier domestiqué.
– La croissance est très rapide en général. Leur longévité peut atteindre 1 000 ans, voire plus (voir à Arbres remarquables) ; vers 300 ou 400 ans, les arbres offrent encore une bonne production de fruits.
– Ce sont des arbres de 12 à 30 m, jusqu’à 40 m, au tronc pouvant atteindre 3 à 4 m de diamètre, au port dressé et étalé.
– L’écorce est lisse et grise devenant, avec l’âge, brune très fissurée et se vrillant en hélice.
– Rejets de souche.
– Des champignons vivent en symbiose avec les racines – mycorhize.
– Les grandes feuilles caduques sont simples et dentées en scies espacées, au pétiole (axe reliant la feuille à la tige) assez court, oblongues à lancéolées, gaufrées entre les nervures, disposées en spirales sur la tige. Le débourrement est tardif.
– Les fleurs apparaissent du printemps au début d’été sur une période assez courte, à l’aisselle des feuilles de l’année, unisexuées sur la même plante – monoïques – ou parfois polygames, hermaphrodites et unisexuées sur la même plante ou séparées, car il arrive que les fleurs femelles, sur la partie supérieure de la plante, puissent être bisexuées toutefois on a souvent décelé sur celles-ci la présence de 12 étamines très rudimentaires et souvent avortées. Maturité sexuelle vers l’âge de 20 ans.
Les fleurs mâles sont en longs chatons cylindriques ; elles dégagent une odeur spermatique qui n’est pas appréciée de tous ; elles sont plus nombreuses que les femelles.
∙ Le périanthe (ensemble des pièces protectrices de la fleur) constitué de sépales (pièces du calice) ou de tépales (sépales et pétales se ressemblent) est représenté par 5 à 6 petites dents jaune-verdâtre.
∙ 8 à 15 (20) étamines aux longs filets.
Les inflorescences (grappes de fleurs) femelles sont regroupées par 1 ou 3 (5) à la base des chatons mâles, caractéristique provenant d’un caractère ancestral. Elles sont composées de 2 à 3 fleurs entourées de nombreuses bractées vertes.
∙ Le périanthe est constitué de 5 à 8 petites dents triangulaires.
∙ L’ovaire est composé de 3 à 6 carpelles (loges) soudés et surmontés d’une touffe de 3 à 6 styles (tige de l’organe femelle reliant l’ovaire au stigmate) jaune pâle.
Les châtaigniers cultivés sont autostériles. La pollinisation est obligatoirement croisée avec un autre individu ; pollinisation par le vent – anémophile et les insectes – entomophile ; les abeilles sont attirées par l’odeur des fleurs mâles et l’abondant nectar des fleurs femelles. La nouaison (stade de transformation du pistil (de l’ovaire) en fruit après pollinisation et fécondation) se produit sous la chaleur estivale.
En savoir plus sur La Fleur et sur les Inflorescences.
– Les fruits sont enveloppés dans une cupule globuleuse, piquante appelée bogue qui s’ouvre en 3 ou 4 valves ; la bogue porte généralement 2 à 3 akènes (fruits secs à graine unique non soudée), les autres ont avortés ; ils contiennent chacun une amande protégée par une couche épaisse, brune et luisante et cloisonnée par une fine couche, le tan.
La cupule formée d’épines est issue de la transformation des bractées de la fleur femelle contrairement à la bogue des marronniers qui est l’enveloppe du fruit, transformation de la paroi des carpelles. D’ailleurs, chez le châtaignier, cela se vérifie par la présence de petits plumets au sommet de l’akène, plumets qui correspondent aux styles de la fleur.
La plante mère coupe le cordon ombilicale – le funicule – de ses rejetons qui tombent au sol à l’ouverture des valves ; c’est la dissémination barochore (gravité) qui forme des forêts.
La production de fruits sera fonction de la chaleur de l’été, c’est un arbre thermophile, qui aime la chaleur.
– Les châtaigniers sont sensibles à deux maladies cryptogamiques :
∙ La maladie de l’encre due au Phytophthora cinnamomi qui s’attaque plutôt au collet et Phytophtora combivora qui contamine les racines.
∙ Un chancre est dû à Cryphonectria parasitica qui s’attaque à l’écorce.
L’espèce sativa, malgré tout, résiste mieux à ce dernier que l’espèce américaine dentata qui fut décimée. Les espèces asiatiques sont beaucoup moins sensibles à ces maladies.
– France
∙ À Éraudière, commune près de Nantes en Loire-Atlantique, un châtaignier, selon la tradition, aurait été planté en 756 mais les espaces verts l’estiment à 800 ans; il mesure 10 m pour un diamètre de 3 m.
∙ Le châtaignier de kerséoc’h à Pont l’abbé dans le Finistère, avec ses 1 200 ans, a survécu à un ouragan et deux incendies, celui de 1965 le ravagea mais il repartit du reste de la souche qui a une circonférence imposante.
∙ Le châtaignier du « Brûlis », à Neuillé dans le Maine et Loire près du Château du Goupillon, atteint 1 000 ans et 12 m malgré la foudre qui s’est abattue sur lui lors de la seconde guerre mondiale.
∙ Le châtaignier au lieu-dit ‘Les Derouinières’ à Mouliherne dans le Maine et Loire est millénaire.
∙ Le châtaignier des Nonneries d’Abbaretz en Loire Atlantique atteignait 20 m pour 2,50 m de diamètre lorsqu’un incendie le ravagea en 1985. D’anciennes branches tombées ont pris racines formant ainsi cinq autres arbres !
– Italie
À Sant’Alfio sur les pentes à l’est de l’Etna, à 550 m d’altitude, se trouve un châtaignier qui aurait 2 000 ans, certains avancent l’âge de 3 000 ans, si on ne connaît pas exactement son âge, on peut toutefois le considérer comme le plus vieux châtaignier d’Europe.
Ses nombreux troncs lui assurent une circonférence imposante d’environ 59 m pour une hauteur de 22 m ; chaque année, il produirait 400 kg de châtaignes.
Il est nommé ‘Châtaignier des cent chevaux’ depuis le XIV° siècle car la Reine napolitaine Jeanne Iere d’Anjou, escortée de cent cavaliers, se serait abritée sous sa ramure, d’autres récits évoquent plutôt la reine Jeanne d’Aragon (mais laquelle ?), d’autres encore pensent qu’il s’agit d’une légende ! Toutefois, cet arbre géant est particulièrement accueillant, ce que souligne Antonio Filoteo, un grand savant italien du XVI° siècle, dans un de ses écrits :
« … son grand tronc, creusé par la nature, abrite les moutons, les chèvres, les bergers et les mineurs. Et l’on a parfois vu sous lui un troupeau de trois cents moutons. »
Cet arbre est classé monument national en Italie.
– Le bois est jaune-brun, imperméable et élastique.
∙ Charpentes – parquets – meubles – tonneaux – piquets – ruches – cercueils – vannerie… Les castagnettes sont fabriquées avec son bois.
∙ La forte présence de tanins rend ce bois imputrescible, résistant à la pourriture et aux insectes. Le tanin est utilisé pour le cuir.
∙ L’odeur du bois est réputée pour éloigner les mouches et donc les araignées qui ne s’y installent pas.
∙ C’est un bois de chauffage moyen qui pète très fort sous l’effet du feu par la silice qu’il contient, à réserver pour les foyers fermés ; son charbon de bois s’éteint assez vite.
– Teinture beige avec les bogues.
– Médicinales : diarrhées et toux.
– Alimentation
∙ Charles de l’Écluse trouvant une ressemblance du fruit de la châtaigne avec la graine du marronnier d’Inde – Aesculus hippocastanum (introduit en France beaucoup plus tard), il lui donna le même nom de ‘marron’ ce qui entraîna une vaste confusion entre ces deux genres différents, confusion qui perdure !
Marron pourrait provenir du mot ligure (langue d’une région d’Italie, la Ligurie) ‘mar’ signifiant caillou, rocher, pour l’apparence de sa graine lisse, ronde et dure, ou bien de l’italien ‘marrone’ signifiant ‘grosse châtaigne’, désignant une châtaigne de luxe non cloisonnée.
La marelle a la même origine en référence au caillou avec lequel on joue. Dans le dictionnaire universel de la langue française un maron est un cœur non calciné d’une pierre à chaux, l’origine initiale reste inconnue.
∙ La culture de la châtaigne est la castanéiculture.
On peut trouver les fruits de l’espèce sativa sous le nom de ‘noix d’Héraklion’ ou encore ‘noix de Sardaigne’… noms selon l’endroit de culture.
Une des plus connues et réputées pour ses fruits est ‘Le Marigoule’ qui est en fait un hybride naturel entre Castanea crenata et Castanea sativa, obtenu en 1946 à Migoule près de Brive, en France.
Il existe différentes manières de consommer la châtaigne : graine rôtie ou bouillie – farine en pain et galette – confiture – marron glacé…
Au Moyen-Âge, lors de disettes, on faisait du pain avec la farine de châtaignes de l’espèce sativa. Arbre des régions pauvres où la culture céréalière était difficile, on le surnomma ‘arbre à pain’ ou ‘pain du pauvre’. D’après le médecin lyonnais Symphorien Champier (1471-1538) : « La châtaigne était l’aliment principal de nombreuses régions françaises ».
L’ironie veut qu’autrefois considérée comme nourriture des pauvres, la châtaigne est maintenant un produit de luxe, le fameux marron glacé !
Le marron, dont on fait le marron glacé, est issu d’un fruit unique dans sa bogue, produit par un châtaignier greffé. La châtaigne est normalement poly-embryonnaire et les fruits sont cloisonnés par le tan. La production de ‘marron’ consiste donc à sélectionner des fruits non cloisonnés et uniques. L’appellation commerciale de ‘marron’ impose au minimum 78% de fruit non cloisonné.
La farine de châtaignes est devenue aussi très à la mode étant dépourvue de gluten.
∙ Dans les Cévennes, les troncs creux des vieux arbres étaient utilisés pour installer des ruches.
Le miel foncé a un goût prononcé, il ne cristallise pas facilement car il est riche en fructose.
– Mythologie
∙ Gréco-romaine : le châtaignier représente la dépouille de la nymphe Néa qui se tua pour ne pas céder aux avances de Jupiter. Ce dernier fort en colère la métamorphosa en un ‘Casta Nea’, chaste Néa, un châtaignier dont les fruits piquants rappellent cette aventure.
∙ Grecque : considéré comme ‘le gland de Zeus’. Aucune explication trouvée sur ce nom.
∙ Celte : considéré comme le gardien des hommes et des bêtes – le gardien de l’Ouest – le gardien de la porte de l’hiver – l’arbre de la saison d’automne.
– Symboles
∙ Prévoyance.
∙ Virilité.
∙ Aphrodisiaque.
∙ Purgatoire : l’arbre creux serait un passage pour l’au-delà. Dans certaines régions d’Europe, on dépose des châtaignes dans les cercueils.
Une tradition recommande de placer une châtaigne sous son oreiller le jour des morts.
Mise à jour août 2024.