Bignonia et Campsis sont des genres très proches inclus dans la famille des Bignoniaceae.
Si cette famille est majoritairement constituée de lianes, on y trouve aussi des arbres et pas des moindres comme le Catalpa, le Rademarchera ou le Jacaranda et aussi des arbustes tels les Tecoma.
Cette famille est subdivisée en 7 tribus dont 4 principales : Bignonieae – Coleeae – Crescentieae – Tecomeae et Eccremocarpeae – Oroxyleae – Tourrettieae. Le genre Campsis fait partie de la tribu des Tecomeae et Bignonia de la tribu des Bignonieae ; outre les caractéristiques physiques qui les différencient, les espèces de la tribu Tecomeae sont originaires de l’Ancien et du Nouveau Monde alors que celles des Bignonieae sont originaires du Nouveau Monde (Amérique).
On dénombre 110 à 120 genres pour 650 à 725 espèces selon les classifications. De nombreuses espèces autrefois classées dans le genre Bignonia ont été reclassées dans les genres Campsis, Tecoma, Podranea, Cydista, Saritaea, Dolichandra, Amphilophium… mais ces classifications sont encore en remaniement.
Quelques exemples :
Le genre Campsis ne comporte que 2 espèces mais des hybrides et de nombreux cultivars, il fut autrefois classé dans les genres Bignonia ou Tecoma.
Quant au genre Bignonia, il n’est pas encore vraiment fixé et selon les classifications, ce genre devient monospécifique – Bignonia capreolata ou bien compte 10 espèces (selon l’INPN – Inventaire National du Patrimoine Naturel) ou voire plus d’espèces. Bignonia capreolata a été aussi classé dans d’autres genres : Anisostichus, Batocydia et Doxantha que l’on retrouve d’ailleurs en synonymes.
Campsis grandiflora est originaire de Chine et Campsis radicans d’Amérique du Nord.
Bignonia capreolata est originaire du Centre et du Sud-Est de l’Amérique du Nord, du Missouri au Texas jusqu’à la côte.
Campsis radicans aurait été introduit en Europe au XVIIe siècle. On retrouve sa trace dans les jardins Barberini de Rome sous le nom de ‘jasmin indien’ sous-entendu indien d’Amérique d’après Giovanni Battista Ferrari en 1638.
Campsis grandiflora a été découvert au Japon en 1691 par Engelbert Kaempfer mais il ne fut introduit en Europe et particulièrement en Angleterre que vers 1800.
Bignonia capreolata a été introduit en Europe en 1710.
– Bignonia L.
C’est en 1753 que Linné a officialisé le nom latin de ce genre, nom qui avait été dédié par le botaniste Joseph Pitton de Tournefort à son protecteur Jean-Paul Bignon en 1694 pour désigner l’espèce radicans (désormais Campsis radicans) surnommée jasmin ou trompette de Virginie. Ce nom fut attribué à la famille Bignoniaceae en 1789 par Antoine-Laurent de Jussieu. La dédicace à Jean-Paul Bignon est une dédicace de mérite botanique mais n’a rien à voir avec les bignones.
∙ Le nom d’espèce capreolata est dérivé du latin capreolare – se cabrer, capreolus – le chevreuil, la chèvre, en référence aux vrilles ramifiées s’agrippant partout. Nom donné par Linné en 1753.
∙ Bignone grimpante est son nom vernaculaire précisant le contraste avec certaines autres telle Campsis radicans qui peut aussi ramper.
∙ Crossvine est son nom anglais en référence à la forme en croix de la moelle dans la tige. D’ailleurs dans des anciens ouvrages français, on la trouve sous le nom de bignone porte-croix.
– Campsis Lour.
Ce genre fut créé par João de Loureiro en 1790 ; c’est en fait l’ancien genre Notjo défini par Adanson en 1763 mais non reconnu. Le nom vient du grec ‘kampsis’ – ‘kampa’ signifiant courbé en référence aux filets des étamines.
Les espèces Campsis furent d’abord classées dans le genre Bignonia, nom que l’on retrouve en synonyme ainsi que le nom du genre Tecoma.
∙ L’espèce grandiflora tient son nom latin de ses grandes fleurs d’ailleurs un de ses noms populaires est ‘bignone à grandes fleurs’. Elle fut tout d’abord classée dans le genre Bignonia en 1784 par Carl Peter Thunberg puis reclassée en 1894 dans le genre Campsis par Karl Moritz Schumann.
Son nom chinois est Ling xiao 凌霄 signifiant atteindre les nuages – planer vers le ciel.
Son nom anglophone Chinese trumpet vine rappelle son origine.
∙ L’espèce radicans tient son nom du latin en référence à ses racines adventives. Tout d’abord décrite et nommée Bignonia radicans par Linné puis reclassée dans le genre Campsis par Berthold Carl Seemann avec l’épithète curtisii en honneur à Charles Curtis, enfin en 1867, un des spécialistes des Bignoniaceae Louis-Edouard Bureau l’a nommée Campsis radicans.
On la trouve souvent sous le nom vernaculaire de Trompette de Jéricho en référence à la forme des fleurs en un long tube finissant pas s’évaser largement rappelant les trompettes utilisées par les Israélites lors de la bataille de Jéricho ; pour la petite histoire les Israélites ne pouvant entrer dans la ville, ils firent sonner leurs trompettes et ce son fit écrouler les murs !
Le terme jasmin-trompette qu’on lui attribue aussi laisse supposer une référence à l’aspect liane du jasmin ainsi qu’aux feuilles opposées.
Sa rusticité lui a donné le nom de ‘bignone commune’.
∙ Les 2 espèces portent aussi les mêmes noms communs de Campsis Trumpet vine, nom anglophone en référence à la forme des fleurs ressemblant à une trompette ou de Trumpet creeper signifiant ‘grimpante en trompette’.
Les Bignoniaceae se développent en régions tempérées à tropicales.
Les bignones apprécient le plein soleil mais supportent l’ombre partielle au détriment de la production de fleurs. Elles se contentent d’un sol neutre et bien drainé ; une fois bien installées, elles peuvent supporter une certaine sécheresse.
Dans leurs régions d’origines, on les trouve souvent en lisières de forêts, dans des milieux perturbés, aux bords de rivières, voire même aux abords de marais pour Bignonia.
Leur tolérance au gel atteint de -5°C à -15°C à l’abri des vents. La plus rustique est Campsis radicans qui tolérerait un gel jusqu’à -20°C mais uniquement pour sa partie souterraine ce qui n’est pas le cas de Campsis grandiflora, espèce à réserver pour les régions à climats doux car sa tolérance au gel va de -7°C jusqu’à -15°C mais pas plus de -12°C pour les parties aériennes. Bignonia tolère de -5°C à -10°C.
Les Campsis supportent bien les vents salins et la pollution atmosphérique.
Dans cet article nous envisageons la description du genre Bignonia sur la base de l’espèce capreolata au vu des caractéristiques semblables des autres Bignonia et de certaines espèces proches reclassées ou pas dans d’autres genres.
Malgré leurs similitudes apparentes, on peut facilement distinguer Campsis et Bignonia mais il faut exercer son pouvoir d’observation d’un peu plus près sur les feuilles et sur la façon de s’accrocher à leur support.
– Ce sont des plantes sarmenteuses aux longues tiges grimpantes pouvant atteindre de 5 à 10 mètres. Campsis radicans (par exemple) peut aussi ramper au sol.
Leur croissance est rapide.
La grande différence ente Bignonia et Campsis est le moyen utilisé pour s’accrocher à un support :
∙ Campsis développe à l’aisselle des feuilles, des racines adventives (à partir d’une position atypique) faisant office de crampons, de ventouses. Campsis radicans est plus vigoureuse que grandiflora car elle produit de nombreux crampons lui permettant de s’immiscer dans n’importe quel interstice et donc de s’accrocher un peu partout et dans tous les sens ; quant à grandiflora, beaucoup moins bien pourvue, elle doit être aidée donc palissée sur un support.
∙ Bignonia ne développe pas de racines adventives mais elle sacrifie une pièce foliaire (division d’une feuille composée) qui se transforme en vrille (pièce foliaire qui s’accroche à un support) ramifiée lui permettant de s’enrouler et donc de s’attacher sur n’importe quel support, de plus la vrille se termine par une sorte de disque adhésif.
∙ Il est d’autres Bignoniaceae dont les vrilles se terminent en 3 griffes très accrocheuses, c’est le cas du Dolichandra (Macfadyena) unguis cati d’où son nom d’espèce griffes de chat.
– L’espèce radicans développe de nombreux drageons (tiges souterraines pouvant développer des bourgeons aériens) ce qui la rend particulièrement envahissante.
– Si les feuilles des bignones présentent des similitudes, elles ont aussi de grandes différences qui permettent de les identifier :
∙ Similitudes : elles sont généralement opposées et pétiolées (axe reliant la feuille à la tige), plus ou moins acuminées (la pointe s’amenuise fortement), composées imparipennées (nombre de folioles impaires), aux folioles ovales à lancéolées.
∙ Différences :
Les feuilles de Bignonia capreolata sont persistantes dans les régions clémentes alors que celles des Campsis sont toujours caduques.
Les folioles de Bignonia sont glabres et non dentées alors que les Campsis sont irrégulièrement dentées.
Les feuilles de Bignonia ne sont composées que de 3 folioles dont 1 est modifiée en vrille. Celles de Campsis grandiflora sont composées de 7 à 9 folioles au revers glabre alors que celles de l’espèce radicans sont composées de 7 à 11 (13) folioles au revers duveteux.
À la base du pétiole, Bignonia développe des pseudo-stipules (appendices membraneux) foliacées, cordiformes et persistantes alors que les Campsis n’ont pas de stipules.
– Généralement les fleurs des Bignonia fleurissent du début du printemps au début de l’été alors que les Campsis s’épanouissent durant l’été jusqu’au début de l’automne ; au nord de la Loire, la floraison ne commence parfois qu’au début du mois d’août.
Campsis et Bignonia ne dégagent pas d’odeur mais le cultivar Bignonia capreolata ‘Dragon Lady’ dégage un parfum à l’odeur de café. Toutefois, les fleurs savent attirer de nombreux clients en leur offrant un disque nectarifère à la base de l’ovaire, riche en saccharose : les colibris (particulièrement Archilochus colubris pour l’espèce radicans dans sa région d’origine) mais aussi les guêpes, les bourdons et les plus performantes les abeilles.
La plante produit aussi des nectaires (glandes qui excrètent le nectar) externes – extra-floraux sur différents organes. C’est pourquoi l’on trouve souvent de nombreuses fourmis sur les bignones dont leur rôle est surtout de voler le nectar et de faire fuir les autres insectes pour garder le butin !
Chez les bignones, les fleurs sont hermaphrodites (bisexuées), elles se développent généralement en inflorescences (grappes de fleurs).
Pour Bignonia capreolata, ce sont de petites grappes à l’aisselle des feuilles de 1 à 3 fleurs en trompette de 4 à 5 cm. Elles sont bicolores, au tube violet-orangé à l’extérieur et à l’intérieur, avec les extrémités des lobes incurvées, jaunes. Hormis la taille plus petite et l’aspect du tube, les fleurs sont constituées comme celles des Campsis.
Les Campsis proposent une longue floraison avec des inflorescences à l’extrémité des pousses de l’année, en thyrses (grappes) de cymes (une première fleur terminale puis des ramifications secondaires) opposées pouvant comporter plus d’une vingtaine de fleurs pour radicans et une douzaine pour grandiflora.
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Les fleurs sont en trompette de 5 à 10 cm, de l’orange au rouge; chaque fleur est portée par un pédicelle (axe portant la fleur d’une inflorescence) protégé par 2 bractées (organe intermédiaire entre la feuille et le pétale) minuscules. Les fleurs de radicans sont plus petites que celles de grandiflora. Généralement, les pétales de grandiflora sont écarlates à rouge-orangé et orange à orange soutenu pour radicans.
Description générale de la fleur :
∙ Calice campanulé, vert, jaune-verdâtre ou orangé, se terminant par 5 petits lobes lancéolés formant de petites dents ou tronqués (souvent chez Bignonia). Le calice des Bignonia est plus petit que celui des Campsis.
∙ Les boutons floraux à émergence sont très esthétiques.
∙ La corolle tubulaire est formée de 5 pétales unis finissant par s’évaser en se séparant et en s’incurvant ; les lobes sont souvent légèrement bilabiés (2 parties), 2 très proches formant une lèvre et 3 autres plus écartés formant la deuxième lèvre.
∙ 2 paires d’étamines didynames (terme créé par Linné pour qualifier une fleur à 4 étamines dont une paire est plus longue que l’autre) et 1 courte staminode (étamine atypique et surtout stérile) près de la base du tube. Les longs filets sont plaqués contre la corolle supérieure. Les anthères (extrémité fertile d’une étamine) divariquées (les éléments s’écartent brusquement) sont matures avant le stigmate (extrémité supérieure du style) – la protandrie.
∙ L’ovaire supère à 2 carpelles (loges) est posé sur un disque nectarifère, jaune et charnu. Les ovules sont nombreux.
∙ Le long style (tige de l’organe femelle reliant l’ovaire au stigmate) filiforme et saillant persiste avec le calice après la chute des pétales. Selon une étude chinoise, le stigmate est sensoriel ; ses 2 lobes larges et aplatis s’ouvrent à maturité mais se referment l’un contre l’autre après contact du pollinisateur si la récolte de pollen est suffisante soit >350 grains, permettant ainsi la fécondation, dans ce cas les lobes ne se rouvrent pas et la fleur stoppe sa production de nectar.
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Le Catalpa, arbre de la même famille, peut servir de porte-greffe ; sinon les racines d’une bignone âgée peuvent être utilisées comme porte-greffe ce qui permet à la future plante de fleurir plus tôt, soit 3 à 5 ans plus tard au lieu des 10 ans d’attente à partir du semis !
Il est certaines espèces anciennement nommées Bignonia qui présentent l’aspect floral des Campsis mais avec les feuilles et les vrilles de Bignonia, c’est le cas de la merveilleuse Amphilophium buccinatorium, originaire du Mexique, dénommée en premier par Lindley en 1775 Bignonia cherere. Elle est à réserver uniquement en climat méditerranéen en France.
– Les fruits se développent à l’automne en une capsule allongée, une silique (fruit à 2 parties séparées par une cloison membraneuse) de 15 à 20 cm, plus ou moins aplatie, brun foncé, déhiscente (ouverture spontanée), souvent marcescente (demeure sur la plante pendant l’hiver).
Certaines Bignoniaceae produisent de très longues capsules ondulées et pour exemple Dolichandra unguis-cati avec ses 30 à 75 cm de long.
– Les nombreuses graines aplaties sont ailées – dissémination anémophile (vent) mais les fourmis assurent aussi une dispersion au sol.
– Hybrides et nombreux cultivars
Vers 1850, les pépiniéristes Milanais, les frères Alberto Linneo et Carlo Ausonio Tagliabue ont créé un hybride entre Campsis radicans (parent mâle) et Campsis grandiflora (parent femelle) : Campsis x tagliabuana ; il possède les qualités de ses deux parents.
De cet hybride ont été créé des cultivars :
∙ Campsis x tagliabuana ‘Mme Galen’ a été créé en France vers 1889 par l’horticulteur Félix Sahut. Il procure une longue floraison.
∙ Campsis x tagliabuana ‘Indian summer’ a été créé par les pépinières hollandaises Henk Kuijf et fils en 1988. C’est le cultivar idéal pour les régions peu ensoleillées, il est aussi moins envahissant et peut être cultivé en pot.
– Ennemis
Pucerons – araignées rouges (remède : purin d’orties) – cochenilles – oïdium (remède : lait écrémé dilué).
Campsis radicans est très résistant à d’éventuels ennemis.
– Multiplication
Le marcottage est la solution idéale.
– Ornementales
Couverture de murs, treilles ou clôtures. Taillées, certaines bignones peuvent former un buisson.
Toutefois, ce sont des plantes considérées très envahissantes ; les bignones à vrilles peuvent même envahir les fils électriques.
– Médicinales
Les bignones sont réputées dépuratives et fébrifuges.
Elles favoriseraient la diurèse – sécrétion d’urine et la diaphorèse – transpiration.
Campsis grandiflora est utilisé avec précaution en pharmacopée chinoise dans la circulation du sang, sa racine traite les douleurs rhumatismales et les ecchymoses. Attention, son suc est considéré comme irritant.
Les Amérindiens, les cherokees utilisaient Bignonia capreolata pour soigner la diphtérie, l’œdème, les maux de tête et les rhumatismes…
Elle est utilisée en médecine traditionnelle aux Antilles pour diverses affections.
En Chine, dans le langage des fleurs, Campsis grandiflora – Ling xiao représente la réputation.
Mise à jour le 18 août 2020.